Hôpital de Saint-Malo : une 3ème vague Covid avec des patients plus jeunes et dans un état plus grave

Dans le service réanimation de l'hôpital de Saint-Malo, les malades du Covid sont aussi nombreux qu'il y a un an. Ils viennent de Saint-Malo et même de Fougères et Vitré, faute de place au CHU de Rennes. Les équipes ont vu cette 3ème vague déferler avec des airs de retour à la case départ.

Ce matin-là, dans le service réanimation de l'hôpital de Saint-Malo, le calme semble revenu. La ruche des soignants s'active, mais sans l'effervescence de la semaine passée. Infirmiers, médecins et aides-soignants passent de chambre en chambre, adaptent les traitements sans arrêt.

Ce septuagénaire est en phase de réveil, il est intubé, branché de partout. Il ne bouge pas et ne répond à aucune sollicitation. Trois soignants sont autour de son lit. L'un masse ses pieds, l'autre surveille ses constantes, un troisième repositionne correctement sa tête sur l'oreiller et s'apprête à lui administrer un nouveau traitement. Dehors, une infirmière et un médecin échangent sur son état. Faut-il baisser la sédation pour qu'il se réveille doucement ? Voilà 15 jours qu'il est hospitalisé, son état est stabilisé, il va mieux. 

 


Deux patients admis par jour, du jamais vu en si peu de temps

Un an après le début de la crise sanitaire et alors que la France dépasse le seuil des 100 000 morts du Covid-19, le personnel du service de réanimation du Centre Hospitalier de Saint-Malo en Ille-et-Vilaine vient de connaître une 3ème vague. Les équipes n'ont pas ménagé leurs efforts. Lors de cette première quinzaine d'avril, elles recevaient presque 2 patients par jour, du jamais vu, en si peu de temps. Il a fallu pousser les murs, ouvrir des lits de réa en cardiologie et faire sortir plus tôt que prévu des patients qui allaient mieux et pouvaient être pris en charge dans d'autres services. Cette semaine est plus calme. Le dernier patient est arrivé il y a 24 heures et l'un d'entre eux est sur le point de sortir. 

Actuellement, 11 patients sur 12 sont hospitalisés pour une infection Covid, au service de réanimation. La plupart sont intubés et ventilés. 

En général, les malades du Covid-19 séjournent deux semaines en réa. Parfois plus. Maximilien Chesnais, interne en anesthésie parle de ce patient hospitalisé dans le service, depuis novembre dernier. Cinq mois de réanimation, desquels il ne sortira pas sans séquelles. 

 

 

Depuis le début de cette nouvelle crise, le profil des malades a aussi évolué. Leur état de santé est plus grave. Ils sont aussi plus jeunes, entre 65 et 75 ans, explique la cheffe de service, Laura Müller. Aujourd'hui, le plus jeune d'entre eux a 44 ans. Il a été hospitalisé, il y a 15 jours. Son réveil est délicat. Deux infirmiers et deux médecins refont le point sur son état de santé. Il ne souffre pas, mais est agité. L'équipe réadapte son traitement en permanence. 

En ce moment, on est dans la phase de sevrage pour son réveil, c’est très compliqué puisqu’il est très agité, ce qui empêche d’aller vers un sevrage serein. On l'a endormi, réveillé, puis endormi, puis réveillé à nouveau. C'est une adaptation minute par minute, voire seconde par seconde. Beaucoup de ces patients qui ont la pathologie du Covid sont dans cet état : très agité psychologiquement, très angoissé. Avec eux, on tâtonne tout le temps.

Charlotte Quentin, médecin en réanimation

Un retour à la case départ

Ici, aucun personnel médical n'a démissionné depuis le début de la crise sanitaire. Tous restent engagés. "Je dirais que mon équipe va bien, dans le sens où ils restent mobilisés, explique Laura Müller. Ils sont toujours motivés, toujours présents, toujours engagés. Ce sont des soignants. Des soignants de réanimation qui ont l’habitude de prendre en charge des patients graves, donc ils répondent présents quand c’est nécessaire."

D'autres sont ici en renfort, c'est le cas de Virginie Leroux, onze ans de réanimation derrière elle. Cette infirmière a vécu la première vague dans l'Est de la France. Elle a déménagé dans la région de Saint-Malo cet été et travaille depuis quelques jours dans le service réanimation de l'hôpital. Elle a fait une pause de deux mois avant de reprendre son travail.

C’est épuisant au quotidien. Physiquement et surtout psychologiquement, c’est très fatiguant. Il y a une espèce de lassitude en plus, au bout d’un an qui apparaît, avec cette question, est-ce qu’on va s’en sortir ? Ça fait réfléchir. Ça fait réfléchir sur l’avenir.

Virginie Leroux, infirmière

Maëva Chivet est aussi infirmière, au sein du service. Elle a été diplômée quelques mois avant le début de la pandémie. Elle n'a presque connu que le Covid. Cette crise na pas ébranlé sa motivation, mais aujourd'hui, elle avoue une certaine lassitude de voir déferler cette troisième vague.

On a l’impression de revenir en arrière, de ne pas s’en sortir et de ne pas voir le bout. Quand on arrive dans le service, on ne sait jamais ce qu’il va se passer dans la journée, si l’état des patients va se dégrader, combien de nouveaux patients vont arriver etc. S’il y a un an, on avait dit qu’on sera encore là, je n’aurais pas cru.

Maeva Chivet, infirmière

"Il y a un an, on ne savait rien sur le Covid"

Ni Virginie Leroux, ni Maëva Marquet n'ont baissé les bras. Au contraire. "Il faut continuer à croire que ça va s’arrêter", dit Maëva. Toutes deux expliquent aussi combien elles ont appris à soigner les malades du Covid.

Quand cette pathologie a émergé, on ne savait rien, on ne savait pas prendre en charge les patients, on ne savait pas les ventiler. Ça a été difficile pour les équipes et au fil du temps, la prise en charge s'est affinée. Maintenant on a de très bonne prises en charge, les équipes font un travail formidable.

Virginie Leroux, infirmière

Dans une chambre voisine, Morgane Marquet refait le plein de matériel dans un chariot. Draps, alèses, seringues etc.


"Ça fait peur de se dire qu’il n’y aura pas de fin"

Elle est aide soignante en réanimation depuis 2016. Elle aussi trouve cette crise sans fin, très longue. "Je suis plutôt fatiguée, même si c’est plus moral qu’autre chose, car en Bretagne, on a été relativement épargné lors de la première vague, mais c’est récurrent donc ça fait peur de se dire qu’il n’y aura pas de fin."

Elle gardera en tête, des traumatismes liés à cette crise qui n'est pas terminée.

 Je me souviens du premier décès ici, sans sa famille qui ne pouvait pas venir [lors de la première vague, les visites étaient interdites aux familles]. Je me souviens de ça, de ce patient, je sais dans quelle chambre il était et je n'oublierai jamais. 

Morgane Marquet, aide-soignante

Cette fois, les visites sont autorisées pour les proches. Ils peuvent passer 30 minutes derrière la vitre de la chambre ou au téléphone, quand c'est possible. Des visites difficiles pour les familles, mais indispensables et nécessaires pour appréhender la maladie et soutenir les malades. 
 

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